La publicité papier, toujours plus de déchets

Elle est la forme de publicité la plus ancienne : on peut supposer que l’apparition des publicités papier coïncide avec l’apparition de l’imprimerie, au XVème siècle, où sont distribués les premiers flyers. Les premières annonces commerciales dans la presse sont distribuées en 1836, permettant de financer les journaux les publiant. S’en suivront les affiches quelques années plus tard, puis les catalogues. Et aujourd’hui encore, il n’est pas rare de retrouver des prospectus par terre dans la rue, ou bourrant votre boîte aux lettres.       


            En France, on estime que chaque année sont distribués 18 millions d’imprimés publicitaires, correspondant à 800 000 tonnes de papier utilisées. Au total, on estime que chaque foyer reçoit chaque année trente kilos de prospectus. Trente kilos ! De quoi travailler les biceps en allant à la boîte aux lettres. A l’échelle mondiale, une lettre sur cinq envoyées est en réalité un prospectus, atteignant le nombre astronomique de 90 milliards de brochures[1]… et la plupart terminent directement dans notre poubelle. En effet, on estime que la publicité « print » est véritablement lue par seulement deux consommateur.ice.s sur dix.

D’ailleurs, la plupart de ces prospectus sont dédiés aux grandes et moyennes surfaces : huit flyers sur dix font de la promotion pour des supermarchés ou des hypermarchés[2]. Si l’on prend l’exemple de l’enseigne de supermarchés Monoprix, on estime que 90% de leurs prospectus sont jetés sans même être consultés. Et pourtant, ces flyers correspondent à presque 15% de leur budget marketing[3]. Car oui, la publicité imprimée coûte cher : on estime que la production d’un catalogue est quatre fois plus coûteuse qu’une publicité numérique. Ces chiffres sont d’autant plus surprenants que la publicité papier est prouvée moins efficace que sont équivalent sur internet. Autant d’argent jeté par les fenêtres !

            Et ces tonnes de papier jetées chaque année, quel est leur impact ? On estime qu’un arbre est capable de produire entre 0,5 et 1 tonne de papier. Donc, si l’on reprend nos chiffres de 800 000 tonnes de papier par an distribuées en France, cela correspond à 800 000 arbres coupés…dans le meilleur des cas. Seulement pour un pays, pour une seule année !

Désormais, les prospectus et catalogues doivent obligatoirement être imprimés sur des pages recyclées, ou issues de forêts gérées durablement. Vous l’avez sûrement déjà remarqué : les labels FSC (Forest Stewardship Council) ou PEFC (Programme for the Endorsment of Forest Certification Schemes) s’invitent sur nos catalogues papier. Présents partout dans le monde, ces labels garantissent que le bois utilisé provient de forêts gérées de manière « durable ». Mais ces labels sont de plus en plus critiqués pour son manque de contrôle et surtout son attribution à des entreprises dont la bonne volonté écologique est contestée. Et à cela s’ajoute toujours la pollution liée à l’impression, au transport, et à la distribution. Enfin, les encres et le glaçage utilisés peuvent être nocifs pour notre santé et pour l’environnement, sans parler de certains papiers blanchis au chlore[4] : leur recyclage doit être très encadré.

            Heureusement, des mesures ont déjà été prises pour limiter l’impact de la publicité papier. De même, ces publicités doivent inciter au recyclage ou à la réutilisation, avec obligation d’apposer des mentions légales telles que l’incontournable « Ne pas jeter sur la voie publique ». Sur leur distribution aussi, les règles sont strictes : il est interdit de les déposer sur les pare-brise des voitures, ou de les laisser dans les boîtes aux lettres ornées d’un autocollant Stop-Pub, sous peine d’amendes. D’ailleurs, une proposition de France Nature Environnement pour le projet de loi Anti-Gaspillage pourrait aller dans ce sens : inverser le système Stop-Pub en proposant un système Oui-Pub ! Cela permettrait aux quelques personnes intéressées par ces publicités, principalement nos aînés, de continuer à recevoir leurs catalogues.

            Mais, nous l’avons vu, ce type de publicité est très coûteux et peu efficace, si bien que de plus en plus de marques lui tournent le dos. Serait-ce la fin de la publicité papier ? Il est encore tôt pour le dire, mais son déclin est bel et bien amorcé.

Fanny Clausse

[1] « 18 milliards de prospectus publicitaires non sollicités sont imprimés en France, chaque année » (en ligne), publié le 18 décembre 2019 par MAGDELAINE Christophe < https://www.notre-planete.info/actualites/2573-prospectus-papier-publicite#:~:text=Selon%20France%20Nature%20Environnemnt%2C%2018,et%20par%20bo%C3%AEte%20aux%20lettres> consulté le 29 novembre 2020.

[2] En 2007

[3] Source : Tiendeo.

[4] Zéro prospectus : la contre-attaque greenwashing des imprimeurs (en ligne) publié le 4 février 2011 par Olivier Philippot < https://www.greenit.fr/2011/02/04/zero-prospectus-la-contre-attaque-greenwashing-des-imprimeurs/> consulté le 28 novembre 2020.