Eva Genel, co-fondatrice du label éco-responsable FiG

Nous avons reçu en interview Eva Genel, co-fondatrice du label éco-responsable FiG. L’acronyme signifie Food Index for Good. L’association a mis au point un outil de diagnostic des pratiques éco-responsables des restaurants en se basant sur de multiples études scientifiques.
Au cours de cet entretien, nous avons pu discuter du rôle et de l’impact de ce label, ainsi que de l’importance d’inclure l’alimentation dans la réflexion écologique.

 

Quelles sont vos actions ?
Notre objectif principal est de faire avancer l’alimentation durable. Les actions que nous mettons en place pour cela sont de labelliser les restaurants éco-responsables et diagnostiquer leurs pratiques. L’outil que nous avons créé permet d’établir une note d’éco-responsabilité des restaurants étudiés. Lorsque ceux-ci obtiennent un bon niveau, nous les mettons en avant sur nos plateformes partenaires. Lorsqu’ils ne sont pas encore au niveau, nous leur proposons un accompagnement pour améliorer leurs pratiques.

 

Quelles sont ces pratiques que vous notez ?
Notre parti pris est de lister l’ensemble des actions que le restaurant a mises en place, que nous vérifions sur la base de ses factures, puis d’attribuer à chacune de ces actions des points pour signifier leur impact sur la planète. Si le restaurant n’a pas d’approvisionnement en bio, il n’aura pas les points liés à cela ; s’il en a nous pourrons lui donner des points. Le maximum de points sur cette thématique est donné si le restaurant est certifié bio.

 

En quoi votre diagnostic permet-il de montrer aux restaurants leur éco-responsabilité ? Il y a pas mal de fausses idées qui circulent sur l’éco-responsabilité et le développement durable. Par exemple, consommer local est une pratique très utile qui aura un impact fort sur l’économie et les questions sociales, mais elle n’aura pas forcément d’effet sur le plan environnemental. Les aliments sont beaucoup plus impactant par leur production que leur transport. L’empreinte la plus grande va être celle liée à la consommation de viande et de poisson : il faut donc alléger les quantités de viande et poisson et privilégier le végétal. Ensuite viendra le respect des saisons, puis l’aspect bio et local des ingrédients. Nous leur envoyons un rapport détaillé sur lequel ils peuvent suivre leur nombre de points, où est-ce qu’ils en sont et ce qu’ils peuvent encore améliorer.

 

Quel est le moyen concret, à la suite à cette attribution de points, pour les restaurateurs, de montrer qu’ils sont labellisés ?

Nous leur délivrons un autocollant qu’ils peuvent mettre en devanture. Nous avons aussi un partenariat avec TheFork.com (anciennement LaFourchette). Sur ce site, le restaurant sera labellisé et intégré au filtre des restaurants éco-responsables. Notre partenariat avec l’application Etiquettable permet aussi d’apporter une visibilité supplémentaire à ces restaurants.

 

A quelle échelle sont impliqués les restaurants que vous suivez ?
Plus de 200 restaurants sont actuellement suivis par notre label. Certains avaient dès leur lancement choisi de partir dans une démarche éco-responsable. D’autres restaurants mettent en place progressivement les actions qui les amènent à être plus éco-responsables. Être éco-responsable ne coute pas plus cher, il est tout à fait possible d’être éligible à notre label sans budget supplémentaire. Il y a cependant des pratiques qui peuvent nécessiter un budget, par exemple la mise en place d’un compost ou d’une consigne. Nous leur donnons une liste d’actions adaptées à leur structure à mettre en place pour qu’ils progressent.

 

Comment est établi votre système de points ?
L’échelle est ouverte, notre objectif est de pouvoir rajouter des actions si la science prouve l’utilité d’une pratique que nous n’avions pas encore incluse. Ce sont des choses qui arrivent régulièrement, notamment par rapport à la problématique autour de la viande, qui est de mieux en mieux comprise. L’échelle n’a pas de maximum, le nombre de points nécessaires pour être éligible est de 25, les restaurants qui ont entre 25 et 30 points devront atteindre les 30 en deuxième année.

 

Quel a été le déclic qui a amené la réflexion puis la création de votre projet ?
J’ai, personnellement, toujours été touchée par la problématique environnementale, et ce, dès mon enfance. Nous nous sommes penchés en famille sur la question de l’alimentation car celle-ci cause 26% des gaz à effet de serre et c’est ce qui est le plus facile à changer dans nos vies. J’ai pu rencontrer des experts pour discuter de notre façon de compter les points,
si c’était légitime ou pas. Nous avons vraiment essayé de construire quelque chose de légitime scientifiquement et d’objectif.

 

Comment voyez-vous le partenariat avec CIE ?
J’aimerais que l’on unisse nos forces sur la question environnementale. La crise est réelle et les enjeux sont déjà là. Il est nécessaire que les gens en prennent conscience et, sans avoir de discours culpabilisant, qu’ils puissent voir les façons de faire accessibles et qui ont un réel impact. Par rapport à ce désespoir qu’on peut avoir devant la situation écologique, le seul remède est l’action. Nous pouvons faire une différence.

 

Avez-vous déjà eu des retours de restaurants pour qui la démarche était difficile ? Quel est le blocage qui empêche le changement ?
C’est une démarche qui demande de la réflexion, et qu’il faut mener pas à pas, ce qui peut être frustrant, car on avance moins vite qu’on voudrait… Cela ne coûte pas nécessairement plus cher, car certaines manières de fonctionner permettent de faire des économies (notamment la chasse au gaspillage, et le choix de mettre le végétal au cœur de l’assiette). Mais cela demande d’y consacrer temps, efforts et réflexion !

 

Avez-vous labellisé des restaurants partout en France ?
Oui ! Certains restaurants sont en campagne, par exemple des fermes-restaurants. L’idée était pour nous de chercher des restaurants dans toutes les villes pour avoir des labellisés un peu partout sur le territoire.

 

Quel conseil donneriez-vous à un restaurant qui souhaiterait s’engager ?
De nous contacter ! Si vous avez un projet de restaurant, c’est le moment de structurer votre engagement éco-responsable. C’est au moment où on choisit ses fournisseurs, sa carte, sa cible de clientèle et son concept qu’il est important et utile de se poser la question de l’environnement. Pour un restaurant déjà installé, quelle que soit la clientèle, il est possible de mettre en place une carte plus responsable et écologique par exemple. Respecter la planète se fait principalement dans le choix de mettre le végétal en valeur, diminuer viande et poisson, et respecter la saison. Ce que les clients peuvent apprécier et comprendre si vous leur expliquez votre engagement.